Actualités
Montée des eaux : au nord-est du Bangladesh, les femmes s’adaptent au changement climatique
- 05 Août 2025
Actualités
Sunamganj, BANGLADESH – Lorsque la crue balaie le village de Bodipu, dans le nord-est du Bangladesh, la vie continue. Elle s’adapte. Pour les femmes telles que Shakila Akhter, 24 ans et mère de deux enfants, s’adapter n’est pas un choix, mais une question de survie.
« J’étais enceinte de huit mois lors de la dernière inondation », se remémore Mme Akhter. « Nous nous sommes mis·e·s à l’abri pendant trois jours en emportant seulement l’essentiel. Grâce à la formation que j’ai suivie, je savais quoi prendre, comment me préparer et comment protéger ma famille. »
Le village de Bodipur est situé à Sunamganj, un district vulnérable aux risques climatiques, niché dans le haor, un écosystème de zones humides dans le nord-est du Bangladesh. Là-bas, les crues montent subitement et peuvent durer plusieurs semaines, perturbant la vie, déplaçant les familles et coupant l’accès aux services de base. Les facteurs liés au changement climatique, comme les précipitations extrêmes et imprévisibles, aggravent le risque d’inondations dangereuses dans le pays. Alors que plus de 670 000 femmes en âge de procréer vivent à Sunamganj, les événements climatiques de ce genre peuvent avoir des répercussions immédiates et dévastatrices sur la prestation de services de soins de santé sexuelle et reproductive.
Mme Akhter tente désormais de gagner en résilience pour faire face aux catastrophes climatiques. « Maintenant, j’ai recours à des outils de planification familiale, dont j’ignorais l’existence auparavant », explique-t-elle. « Je veux choisir le moment où je me sentirai prête à avoir un autre enfant. »
Trouver des solutions créatives
Des femmes comme Shakila Begum passent à l’action pour aider les autres à se préparer aux chocs climatiques. Mme Begum, bénévole de 26 ans, n’avait suivi que deux jours de formation lorsqu’elle a commencé à travailler directement avec sa communauté. Elle soutient désormais 75 familles locales en agissant comme premier point de contact pour les femmes ayant besoin de conseils sur des sujets comme la planification familiale et les soins de santé maternelle.
« Juste avant son accouchement, une femme avait une tension dangereusement élevée », raconte-t-elle. « J’ai conseillé à sa famille de se rendre à l’hôpital local, où elle a pu accoucher sans complications, et totalement gratuitement. »
Mme Begum a commencé ce travail dans le cadre du projet Partners in Health and Development: Climate Resilience Health System and Community (Partenaires de santé et de développement : résilience du système de santé et de la communauté face au changement climatique), soutenu par l’UNFPA, l’agence des Nations Unies chargée de la santé sexuelle et reproductive, en partenariat avec l’Agence suédoise de coopération internationale pour le développement depuis 2022. L’initiative permet aux femmes et aux filles de Sunamganj de découvrir les liens entre changement climatique et santé, depuis la gestion des complications menstruelles à la préparation à l’accouchement pendant une inondation.
Les nouveaux défis sont l’occasion de faire preuve de créativité pour développer des solutions. Dans le district de Kurban Nagarn, les bénévoles ont commencé à organiser des « pièces de théâtre de rue » pour la communauté locale. Les artistes jouent des scènes associées à des problématiques telles que la santé maternelle, la préparation aux catastrophes et la prévention des mariages d’enfants. Plus de 500 personnes se rassemblent pour regarder chaque représentation.
Anima Akhter, une mère de 24 ans vivant dans la communauté, explique que le théâtre de rue offre un espace pour discuter de sujets difficiles : « Nous voulons partager nos problèmes, en particulier par rapport à notre corps, mais bien souvent nous ne pouvons pas en parler. »
Grâce au soutien de bénévoles comme Shakila Begum, Amina et son mari ont reçu une formation et ont mis au monde leur dernier enfant à l’hôpital, en toute sécurité.
« Nous apprenons à protéger nos enfants et à nous préparer aux inondations », témoigne-t-elle. « Nous partageons maintenant nos connaissances avec les autres. »
Un effort mondial
Malgré ces efforts, des difficultés persistent. Dans les villages sujets aux inondations comme Bodipur, plus de la moitié des accouchements se font encore à domicile. De nombreuses femmes et filles ont honte d’aborder ouvertement des sujets comme les menstruations, tandis que les femmes qui tentent de gagner leur vie par elles-mêmes en faisant pousser des légumes ou en vendant des produits en sont interdites par les normes culturelles. De telles vulnérabilités sont exacerbées par les catastrophes climatiques, qui frappent souvent de façon plus violente les femmes et les filles.
Du 21 au 31 juillet 2025, des spécialistes du monde entier se sont réuni·e·s lors de la Conférence mondiale sur la justice climatique et les populations affectées à Brasilia pour aborder l’impact disproportionné du changement climatique sur les femmes et les filles. L’événement, co-organisé par l’UNFPA et le gouvernement du Brésil, a appelé à prendre des mesures urgentes pour orienter les négociations climatiques en tenant compte du genre et à renouveler l’engagement à comprendre l’impact du changement climatique sur la santé sexuelle et reproductive et les droits qui lui sont associés.
Lors de l’événement, Mme Diene Keita, Directrice exécutive par intérim de l’UNFPA, a pris la parole pour attirer l’attention sur l’impact discriminant du changement climatique : « Les preuves nous montrent que le changement climatique accroît le risque de mortalité maternelle, interrompt l’accès aux moyens de contraception et aggrave le risque de violence basée sur le genre. »
En 2024, l’UNFPA a distribué des fournitures vitales de soins de santé, notamment des kits de dignité et une assistance d’urgence en espèces, à 184 000 femmes au Bangladesh. L’agence est ainsi venue en aide à 19 000 personnes en moins de 72 heures après le début des graves inondations d’août.
« Nos efforts collectifs doivent renforcer la résilience des femmes, des filles et des systèmes de santé pour supporter les chocs climatiques et s’y adapter », affirme Mme Keita. « Se préparer, réagir rapidement et bâtir un avenir meilleur doivent constituer les piliers de notre travail. »